Depuis qu'il est en âge de parler et de comprendre, à sa mesure, ce qu'on pouvait bien lui expliquer, Alec n'a eu de cesse de poser des questions. Il voulait savoir pourquoi on ne pouvait pas mettre un nuage dans la douche et faire venir la pluie pour se laver, ou bien pourquoi les filles avaient le droit de porter des jupes et des pantalons, alors que les garçons n'avaient pas le droit à tout. Petit garçon très curieux et rempli de joie de vivre, ce qu'il préférait à la maternelle, c'était la récréation. Avec ses petits copains, ils jouaient aux cowboys et aux indiens. Alec, ce qu'il aimait lui, c'était être le cowboy et faire les pistolets avec ses doigts et le bruit avec sa bouche pour tuer les méchants indiens. Et il aimait la peinture aussi, celle avec les doigts pour ensuite aller les laver et faire pleins de couleurs dans le grand lavabo tout en longueur.
Mais ce qui retenait le plus l'attention de petit garçon, c'était de savoir quand son papa allait rentrer. Il avait beau crier fort et faire les gros yeux souvent, il l'aimait son Papa et en était fier comme la plupart des enfants de son âge. Parce que Papa était le plus fort et qu'il pouvait surement soulever une voiture comme dans les dessins animés du matin avant d'aller à l'école. Sa maman lui disait souvent qu'il devait partir pour aller travailler. Mais Alec n'aimait pas vraiment. Il voulait que son Papa soit tout le temps avec lui, comme celui de Warren qui n'allait pas travailler.
Un jour, son Papa partit encore. Après avoir crié sur sa Maman. Alec n'aimait pas les entendre se dire des vilaines choses, alors il allait toujours sous son lit et se bouchait les oreilles avec ses petites mains, même s'il entendait encore en réalité. L'enfant aimait bien ensuite rester là une bonne heure, à regarder les lattes de son lit, à tenter de les soulever en poussant avec ses pieds dessus et en cherchant des trésors qu'il avait égaré plusieurs semaines avant. Mais cette fois, le départ ne fut pas le même, parce que son Papa ne revint pas et qu'il ne revint plus.
Si l'on devait retenir un seul autre moment un peu grave de sa vie d'enfant, ce fut un samedi, quand il n'y avait pas cours et qu'Alec avait eu le droit de se rendre chez son copain Jeremy pour jouer dans sa cabane dans le jardin. Jeremy était un garçon sympathique, un peu rondouillard et qui avait toujours des gâteaux dans ses poches. Mais c'était aussi un sacré casse-cou vachement rembourré pour se prendre les coups et amortir les chutes. Du haut de leurs sept ans et alors que la Maman du petit Jeremy était en train de préparer un gâteau au chocolat et au caramel, les deux enfants allèrent grimper dans la fameuse cabane perchée à à peine trois mètres de haut, un véritable Himalaya pour des petits de cet âge. Dans cette cabane, Jeremy y cachait ses trésors. Quelques maquettes d'avions inachevées, des bestioles mortes qu'il avait trouvé en creusant la terre ici et là, et surtout, des bonbons cachés négligemment derrière un vieux drap qui sentait le chien et qui était parsemé des poils du Pit-bull que la petite famille possédait. Après quelques bagarres au sabre laser imaginaires et quelques provocations de gosses, Jeremy insista sur le fait que l'on pouvait sauter du haut de la cabane sans se faire mal pour autant. Mais Alec se fit mal, hurlant comme un jour de guerre dans les tranchées du début du siècle. Il fut conduit à l’hôpital et en sortir avec un bras cassé et pas mal de larmes versées.
Heureusement pour lui, Alec n'était pas le seul garçon dans cette situation. Il n'avait plus de nouvelles de son père depuis plusieurs années maintenant et en bon garçon raisonnable qu'il était, il évitait d'aborder le sujet avec sa mère, voyant à quel point elle pouvait devenir triste et songeuse. Bien évidemment, il y avait des évènements qui n'étaient pas tout à fait pareils sans lui, mais au quotidien, c'était gérable. Alec était une garçon de dix ans équilibré, avec des soucis pour la lecture mais une très grande vivacité mathématique. Sa scolarité se passait bien, sa vie sociale d'enfant également et à la maison, il préférait largement quand sa Maman n'avait pas d'amoureux à ramener, parce qu'ils passaient des soirées ensuite à regarder des cassettes vidéos qu'ils louaient au vidéo club en bas de la rue. En plus de cela, sa mère faisait toujours commander des pizzas lors de ces soirées et c'était bien plus amusant que de devoir jouer seul dans sa chambre pour lui laisser de l'intimité avec un gars qu'elle n'allait surement pas revoir par la suite. A force, Alec s'était habitué à ne plus espérer appeler un de ces hommes Papa. C'était comme ça, et dans sa tête de petit garçon, c'était un schéma familial tout à faire normal. Et puis, certain des messieurs étaient parfois gentils et avaient parfois quelques gentils mots pour lui, voire quelques bonbons ou un petit présent trouvé rapidement dans la poche du veston. Il y en avait même un qui lui avait offert un briquet, de ceux qu'on ouvre avec le pouce et qui s'allument tout seul. Un véritable trésor qui fut immédiatement confisqué par sa Maman, jugeant comme toute bonne mère qu'il n'apporterait que des problèmes et des malheurs à son fils.
Ce fut quand il eut douze ans que sa mère décida de changer d'air. Elle avait l'opportunité d'avoir un meilleur travail, mais il fallait déménager pour cela, parce que la place à pourvoir n'était pas dans le même état. C'était un job mieux payés, avec des horaires plus confortables et surtout des tâches beaucoup plus gratifiantes. La femme avait eu le tuyau de la part d'une de ses cousines, comme quoi ils cherchaient une nouvelle secrétaire dans le cabinet d'avocats voisin à celui dans lequel elle travaillait. Alec et sa Maman partirent donc du Missouri pour se retrouver en Alabama, un état pas si loin de celui dans lequel ils vivaient jusqu'à présent. La vie n'était pas si différente à Montgomery. Il y avait l'appartement, un peu plus grand et avec un accès à une piscine aussi, l'école qui ne changeait pas non plus sauf pour ses copains et de quoi s'amuser et faire de sport. Mais grâce à ce nouvel emploi, la mère d'Alec avait également plus d'argent et la capacité d'offrir une vie meilleure à son fils.
Elle se maria dans l'année, huit mois après pour être plus précis. C'est à son travail qu'elle sympathisa très vite avec l'un des avocats, plus vieux qu'elle d'une dizaine année et récemment veuf. Ils allaient vite, ils se mariaient surement pour de mauvaises raisons et en étaient partiellement conscients, mais Alec l'accepta. Il accepta de vivre dans une grande maison, de recevoir un bébé golden retriever à son anniversaire, à changer d'école encore une fois. Après tout, il voyait sa mère heureuse, souriante comme jamais et qui venait de lui trouver ce qu'il avait toujours désiré au fond : Un nouveau Papa. Même si le pré-ado mit quelques temps à le nommer ainsi, il s'en accommoda assez rapidement, comme de sa nouvelle vie et des facilités qui venaient avec.
L'année de ses quinze ans fut sans doute la plus difficile de sa vie. Alec était en train de muer, de grandir, de changer et tout se chamboulait un peu trop dans sa tête. A l'école, il y avait ceux qui vivaient ça bien, avec un joli coup de pouce de la nature, et ceux comme lui qui devaient prier tous les soirs pour que les boutons d'acnés disparaissent. Ce fut aussi les premiers émois, l'envie de sortir avec la jolie et populaire Keilenn, alors qu'elle courait après les sportifs, comme dans les séries à la télévision.
Mais avoir le cœur brisé ne fut pas sa pire épreuve. Alors qu'il tenter de cacher son chagrin dans sa chambre, Alec fut rejoint par son père d'adoption. Un homme très digne, toujours très gentil et très avenant, qui l'avait tout de suite accueilli comme son propre fils, puisqu'il n'avait jamais eu d'enfant lui-même. L'adolescent tenta de cacher sa peine au mari de sa mère, mais ce dernier insista pour discuter un peu, assis tous les deux sur le lit, comme beaucoup d'autres pouvaient faire pour essayer de comprendre leur enfant. Mais l'homme alla un peu plus loin. D'abord avec une embrassade réconfortante, puis en posant sa main sur la cuisse d'Alec, d'une manière un peu inhabituelle. Ca se finit là, pour cette soirée et les deux se promirent de tout se confier à présent, d'avoir leurs moments rien qu'à deux, comme ils venaient de le faire. Alec se coucha avec un sentiment de quiétude et de soulagement parce qu'il ne pouvait pas imaginer ce qui allait ensuite se passer.
Quelques semaines plus tard et alors que sa mère rendait visite à une tante mourante à Saint Louis, Jason - C'était ainsi qu'il s'appelait - revint à la charge. Si le début de soirée s'annonçait génial avec le match du Superbowl à regarder entre père et fils, il ne fut très vite qu'un prétexte pour pousser la première expérience un peu plus loin. Jason se rapprocha d'abord d'Alec et lui demanda de venir se poser contre lui, pendant qu'une équipe était en train d'en écraser une autre à la télévision. Il lui caressa lascivement les cheveux en lui demandant de lui raconter tout et n'importe quoi, comment se passait sa vie d'adolescent, les rencontres qu'il faisaient, les déceptions qu'il vivait et l'envie de ras-le-bol qu'il devait parfois avoir. Alec sentait le malaise monter et hésitait de plus en plus dans ses réponses, sa voix se faisant plus fébrile à chaque fois qu'il sentait la forte main de Jason lui passer sur la visage. Il en avait des frissons, pas de ceux comme lors d'un premier baiser ou du passage dans une maison hantée à la fête foraine. Un frisson de mal être, comme s'il savait que son père n'avait pas le droit, mais qu'il ne pouvait rien faire pour l'arrêter. Parce qu'il savait sa mère heureuse, encore et toujours et parce que sa vie lui plaisait. Après tout, lui qui avait grandit sans un réel père n'était peut être pas au courant de ce qui se faisait ou non et dans un sens, Jason le faisait se sentir spécial, se sentir grand et fort quand c'était loin d'être réellement le cas.
Un jeu étrange s'installa suite à cette soirée. Il ne fallait rien dire, surtout ne rien dire pour ne pas décevoir sa mère et il était hors de question d'en parler à un de ces amis, parce que c'était quelque chose de trop honteux. Pendant plus d'un an, Alec s'enferma dans une espèce de spirale dont il ne pensait pas voir la fin et une spirale qui devenait de plus en plus dangereuse et dégoutante. Il y avait eu les mots, puis juste une main posée. Des caresses et toujours des mots, toujours des jolis des doux mots qu'on a plaisir à attendre et qui nous touche. Plus le temps passait et plus les échanges - à sens unique pour la plupart- devenaient intimes. Alec ne voulait pas, mais il n'avait pas la force de dire non, de s'imposer et d'imposer les conséquences à sa mère. Souvent, quand elle lui servait son petit déjeuner le matin, elle lui ébouriffait les cheveux comme pour le petit garçon qu'il était toujours dans son esprit de Maman, elle lui disant qu'elle était heureuse de le voir grandir de la sorte et qu'elle était heureuse d'avoir eu tant de chance et de pouvoir lui offrir une vie meilleure. Son sourire était sincère, mais pas celui d'Alec, qui mettait ça sous le compte de l'adolescence. Le sourire de sa mère était sincère parce qu'elle ne savait pas aussi.
Et la seule manière d'exprimer ce qu'il ressentait vraiment, fut son comportement. L'adolescent plutôt banal et passe partout qu'il était passa par plusieurs phases, celle du gothique à celui de l'enfant rebelle qui refusait de passer une nuit entière dans sa chambre sans en sortir en douce pour rejoindre des potes et faire les cons. Aussi parce sa chambre le dégoutait de plus en plus et que c'était un excellent prétexte pour repousser les venus de son beau-père. Ce qui fut le plus étonnant, ce fut comment tout se stoppa. D'un coup d'un seul, comme si rien ne s'était passé. Alors qu'Alec craignait d'entendre les pas de Jason dans le couloirs, le temps passait et il ne venait plus. Comme si ça n'avait été qu'un moment et que ça n'avait jamais eu d'importance. A la place, l'avocat quittait plus souvent la maison et pour plus longtemps. Alec retrouvait là le schéma qu'il avait connu beaucoup plus jeune, mais cette fois, il en était plus qu'heureux. Même sa mère s'en était accommodée, parce qu'avec l'âge, elle avait surement gagné en maturité et qu'elle ne trouvait plus cela nécessaire d'être toujours collé à celui qui partageait son lit et sa vie. Alec tenta de parler une fois du comportement de son beau-père avec lui, mais juste avant d'entrer dans la discussion, il se ravisa, pensant que ça ne servirait à rien de faire mal à une personne supplémentaire et qu'il pouvait gérer, maintenant que tout était terminé.
Alec finit le lycée sans réel problèmes. C'était maintenant un jeune adulte un peu distant avec sa mère, encore plus avec son beau-père mais on personne ne lui en tenait rigueur parce qu'il venait d'être accepté dans une bonne université pour y suivre des études de droit. Pas que ce fut son premier choix, mais il était quelqu'un de plus facile à orienter et tout le monde avait jugé bon qu'il suive les traces de Jason, peut-être pour travailler avec lui plus tard. Ne sachant pas trop quoi faire de sa vie, Alex accepta, parce qu'il fallait bien avoir un diplôme et rendre fier toute la famille et qu'il fallait bien trouver de quoi travailler plus tard aussi.
Ses deux premières années à la fac furent plutôt chaotiques, du côté des études. Il vivait directement sur le campus, dans une petite chambre partagée avec un gars incapable de s'amuser autrement qu'en obtenant des excellents résultats. De son côté, Alec faisait la fête et pour la première fois de sa vie, il se sentit vivre pour lui-même. Il n'en manquait pas une et tenta aussi de fixer avec la jolie Mary, étudiante en psychologie. Mais rien n'y faisait et il la trompa au bout de deux mois, ayant même l'insolence de lui dire avec un aplomb et un calme qui ne lui allaient pas. Pour sa mère, c'était un étudiant qui devait trouver ses marques, parce qu'il était son seul fils et qu'elle était parfois bien incapable de reconnaître ses faiblesses. Pour son beau-père, c'était déjà beaucoup moins amusant puisque c'était à lui de payer les frais de scolarité et tout le reste, alors que ça ne semblait pas aboutir à grand chose. A rien du tout même. Alex redoubla sa première année puis qu'il avait été plus souvent ivre que présent en cours et la seconde ne fut pas plus glorieuse, même s'il se mit au travail, partiellement.
Alors son beau-père décida de lui couper les vivres, pour lui faire comprendre que la vie était loin d'être un jeu. Comme Alec s'était inscrit en psychologie cette fois, il dut trouver un moyen de subvenir à ses besoins quotidien, ainsi que de payer ses propres frais de scolarité, même si sa mère l'aidait de ce côté. C'est par un pote d'un de ces cours qu'il eut vent de ce site internet, sur lequel on s'inscrivait et où l'on recevait des messages pour des rencontres. Il fallait être ouvert d'esprit et ne pas s'attendre à une jeune femme de son âge, ou pas une femme tout court d'ailleurs. Sans trop y croire, puisqu'il n'était pas un Apollon et en était parfaitement conscient, Alec se créa un compte d'abord pour voir s'il pouvait attirer du monde. Il dut attendre près de deux semaines pour avoir une première demande. Un homme de deux fois son âge qui cherchait une compagnie pour certains soirs, à l'abri des regards. Alec savait très bien dans quoi il s'engageait et savait aussi combien il serait payé pour une simple soirée. Ce fut le déclencheur, l’appât du gain. Parce qu'il ne voulait pas se faire virer de l'université alors que les études lui plaisaient cette fois et qu'il fallait avoir de l'argent pour ça. Il ne voulait pas prendre un job et casser son temps dans tout ça, pour toucher au bout de deux semaines ce qu'il pouvait avoir en quelques heures avec cet homme. Et il commença comme ça, pour ensuite de faire une place sur le site, en tant que personnage très agréable à "commander" comme certains disaient. Et il n'y avait pas que des hommes et ce n'était pas toujours pour finir dénudé dans un lit. Bien entendu, les simples diners en compagnie d'autrui payaient beaucoup moins, mais toujours bien plus que tout le reste. Alec n'en parlait pas autour de lui à la fac, encore moins à ses parents. Après tout, il n'avait jamais été stable émotionnellement et avoir ce genre de relation était sans doute ce qui lui convenait le plus, parce que c'était ce qu'il connaissait le plus.
Il le fit tout le long de ses études, pour enfin avoir le droit d'exercer en tant que psychologue du travail, spécialité dans laquelle il s'était engouffrée.
Bien entendu, avec son nouveau statut Alec ne pouvait plus continuer son job d'étudiant. Déjà parce qu'il n'en avait plus besoin et que c'était clairement pour pouvoir passer ses années à l'université à manger autre chose que des Ramen et à squatter chez les uns ou les autres pour avoir un bout de pizza et un peu de bière.
Démarrant dans la vie active, le jeune homme se prit un petit appartement non loin de son premier boulot et toujours à Montgomery puisqu'il connaissait bien la ville et qu'il souhaitait rendre visite à ses parents de temps en temps. Les premiers mois furent compliqués, parce qu'en plus des nouvelles responsabilités qu'il avait dans son nouveau job, à savoir psychologue du travail pour une entreprise en replacement des gens ayant perdus leur emploi, il y avait toute la paperasse à faire pour la vie courante. Alec, lui, était largement plus à l'aise avec la déconne et l'idée d'inviter ses potes à se faire une partie de Fifa dans une sorte de mini-tournois, tout en buvant des bières et en racontant des histoires grasses et grivoises.
Ce fut lors d'une de ses soirées et alors qu'il avait 26 ans qu'il rencontra celle qui allait être sa femme, à peine un an après la première fois qu'ils avaient échangés quelques mots sur les banalités quotidiennes. Rachel était une femme qui savait ce qu'elle voulait, incontestablement. Et elle voulu Alec, d'abord juste dans son lit quelques nuits par semaines, sans attaches et autres parce qu'elle savait qu'elle pouvait partir en mission le jour suivant. Ce fut d'ailleurs ce qui se produisit et Alec n'eut pas de nouvelles pendant quatre mois. Un petit déploiement en réalité. A son retour, elle lui avait manqué, terriblement, au point qu'il lui avait envoyé un mail par jour, sur sa boite personnelle, afin qu'elle ait de la lecture à son retour. Et le fait qu'il soit ainsi avec elle plaisait beaucoup à Rachel, qui aimait être désirer et se faire désirer. Ils se tournèrent autour quelques mois encore, avant de décider de se marier, comme ça, sur un coup de tête, après avoir mangé dans un Burger King et en voyant la publicité pour un mariage à Miami à remporter en jouant à un jeu d'une radio connue. Ce fut Rachel qui lança le projet fou en premier, le truc était que s'ils gagnaient le gros lot, ils se mariaient vraiment... Ce qui arriva.
Être marié à 27 ans n'était pas si surprenant, ce qui l'était plus, c'était de le faire avec une femme que l'on connaissait surtout pour ses prouesses sexuelles et ses histoires de guerre à l'autre bout du monde. Mais après tout, la mère d'Alec l'avait bien fait, avec un peu plus de folie peut être même. Et elle était heureuse, toujours heureuse avec ce mari et son lourd secret. Un secret loin des pensées d'Alec maintenant, qui profitait de sa propre existence et de la construction de sa propre vie.
Dans la même année, Rachel tomba enceinte. Ce n'était pas vraiment prévu puisqu'elle était même en déploiement quand elle apprit la nouvelle par le médecin présent sur place. Évidemment, il était plus qu'urgent pour elle de ne pas rester en zone de conflit et de prendre soin d'elle et de son bébé. Elle eut assez de mal à l'accepter, bien plus qu'Alec qui se réjouissait déjà d'avoir un petit lui courant partout en couche-culotte. Mais Rachel n'était pas une femme maternelle et l'instinct chez elle n'était pas si présent. Une fois le petit Richard venu au monde, elle fit une dépression, pensant qu'elle ne pourrait plus reprendre ce travail pour sa patrie qu'elle aimait plus que tout. Alec dut alors lui promettre d'arrêter son travail pour s'occuper du petit à sa place, qu'elle puisse reprendre le plus tôt possible. Parce qu'ils fonctionnaient comme ça et qu'ils avaient fait la connerie de se marier et de fonder une famille. Le couple ne pouvait pas vivre trop longtemps ensemble sans commencer à se bouffer, des coups de la part de Rachel, des insultes de la part d'Alec qui préférait largement ce terrain. Ils devaient se manquer pour se supporter et en avaient tous les deux conscience. Et même si l'idée d'une nourrice à plein temps était envisageable, Alec préféra arrêter son travail pour se consacrer à son fils, parce qu'il ne voulait pas qu'il souffre du manque d'un de ses parents.
Rachel eut l'opportunité de rejoindre la base de Redstone et d'y trouver un job en rapport avec son métier de soldat, même quand elle ne partait pas en mission. Tout la petite famille déménagea donc là-bas, certain de vivre de nouvelles aventures et d'avoir une vie meilleure. Richard n'était encore qu'un bébé d'à peine un an mais au moins, il allait grandir dans un environnement sain, qui lui apprendrait l'importance du sens des valeurs et du fait d'aimer sa patrie, deux choses très chères à sa mère, qui n'était pourtant pas très présente pour lui.
Comme sa femme était encore moins présente avec lui et qu'Alec commençait à s'ennuyer dans sa vie de père au foyer, il commença à flâner sur internet, d'abord juste pour voir si son ancien site existait encore. Il était toujours là, mais complètement mort, laissé à l'abandon. Alors quelques semaines plus tard, l'homme commença à voir si ce genre de choses se faisaient encore et il ne fut pas surpris de constater que oui et à quel point il avait le choix. Pas pour être client, mais l'envie de retenter l'expérience lui trottait dans la tête. Quand il se levait, quand il tentait de faire manger Richard proprement son petit pot de purée de carotte, quand il choisissait le papier toilette au supermarché pendant ses courses... A peu près tout le temps, parce que sa femme était partie pour six mois au moins et qu'il ne se sentait pas de s’abstenir si longtemps. C'était très à dire et à penser, mais pour se justifier, Alec se disait que ce qu'elle ne savait pas ne pouvait pas lui faire du mal et que putain, il avait besoin d'une vie sociale aussi, de ne pas être que le père du petit.
Sa petite activité particulière reprit donc dans le plus grand secret. Et puis, être en quelque sorte l'objet d'un soir d'un ou d'une autre, ça lui plaisait au fond. C'était aussi pour ça qu'il avait choisi Rachel, parce qu'elle était plus que directive et qu'elle ne se gênait jamais pour lui donner des ordres et lui donner l'impression de le contrôler.