« Je ne veux pas danser Lukas, laisse-moi tranquille. » marmonne l’adolescente bougonne.
« Menteuse ! Je sais que tu adores ça ! Ça ne va pas te tuer de profiter un peu de la soirée, tu sais que ce n’est pas à toi d’être la plus responsable de la maison. » la morigène son grand-frère.
« Il faut bien puisque maman n’est pas capable de l’être quand papa n’est pas là. » grogne-t-elle pour toute réponse.
« Oui eh bien justement, il est rentré, offre-toi une pause. Tu n’as que 17 ans Mercy, tu dois en profiter. » réplique-t-il en lui ébouriffant les cheveux. « Aller viens, j’vais te présenter mes amis » ajoute-t-il en la tirant par la main. « Je te présente Aiden, et… » commence-t-il, mais déjà elle ne l’écoute plus.

La jeune femme n’a jamais été une adepte des contes de fées ni de l’amour au premier regard et encore moins du grand amour. Et pourtant, en plongeant ses yeux dans ceux de cet Aiden, quelque chose s’est passé. Et c’est réciproque.
Lui, tente de se remettre d’une rupture, il pensait qu’elle était l’amour de sa vie, quand il n’était pour elle qu’une passade. Ce soir, lui aussi s’est fait trainer de force pour se changer les idées. Il n’avait qu’une envie : boire un coup, faire bonne figure et rentrer. Mais ses plans ont changé en croisant ce regard.

« Je vous présente ma petite sœur, Mercedes. » termine tranquillement Lukas sans s’apercevoir de rien.
«  Mercy. » corrige-t-elle machinalement.
« Me ferais-tu l’honneur de m’accorder une danse ? » demande Aiden à la jeune femme en lui tendant la main.

L’adolescente jette un regard à son frère qui regarde son ami, stupéfait, avant d’approuver d’un signe de tête. Tout a commencé par un regard et une danse.  Quelques semaines après, le père de Mercy était rappelé au front, et devait ne jamais revenir…
Presque trois ans. C’est le temps que ça a duré. Et ce ne fut pas tous les jours faciles. Entre la mort du patriarche Wayland, mais aussi la famille d’Aiden qui ne voyait pas cette relation d’un bon œil, tentant par tous les moyens de faire pression sur la jeune femme pour qu’elle le quitte. Pourtant elle tenait bon, il était le seul vrai bonheur qu’il lui restait. Au fond elle savait qu’il était celui dont elle avait besoin. Puis un jour…

« Bonjour mon ange… » lui sourit-il sans avoir conscience de la raison pour laquelle elle voulait qu’ils se voient, sans avoir la moindre petite idée de ce qu’elle s’apprête à lui annoncer…
«  Aiden… Je… Je pars. » murmure-t-elle, le voyant prêt à répondre elle s’empresse de reprendre la parole, elle sait que si elle le laisse parler, elle n’y arrivera jamais. «  C’est fini. Je me suis engagée, je pars dès demain pour ma première mission. On a essayé, et je garderais toujours ses années avec toi comme les meilleures de ma vie et les chérirais jusqu’à ma mort, mais tu mérites mieux que la vie que je peux t’offrir. On n’est pas du même monde, il est temps que nous sortions de notre parfaite petite bulle et que nous ouvrions les yeux… Ma famille a besoin de moi, et être avec un militaire… quand on est civil ce n’est pas une vie, j’ai vu ma mère souffrir, mourir un peu plus chaque fois que mon père partait en mission. Je n’ai pas le droit de t’imposer ça. Je suis désolée Aiden. » termine-t-elle les larmes au bord des yeux.
« Ne fais pas ça Mercy, ne nous fais pas ça… » la supplie-t-il.
«  Je l’ai déjà fait Aiden. » soupire-t-elle. «  Je m’en vais. On est jeunes, on a toute la vie devant nous, c’était génial, mais c’est fini. » assène-t-elle.

Elle s’est promis qu’elle ne pleurerait pas, alors ses larmes, elle les retient tant bien que mal. Elle s’est juré de ne pas flancher, de tenir bon, pour sa famille, pour lui. Elle ne peut pas craquer, il ne mérite pas cette vie, il doit comprendre, il doit la laisser partir.

« Qu’est-ce que j’ai fait pour que tu me détestes à ce point ? » demande-t-il calmement, tristement. Il ne sait pas pourquoi, mais il est persuadé d’être coupable, que c’est de sa faute.

Mercy sent sa volonté vaciller. Il pense qu’elle le déteste, elle ne peut pas le laisser croire ça, elle ne peut pas partir alors qu’il pense ça…

«  Tu ne comprends pas… » commence-t-elle à sangloter. «  C’est parce que je t’aime que je te quitte, c’est parce que je veux que tu sois heureux, même si ça doit signifier vivre une vie sans moi. Je t’aime Aiden, et je t’aimerais toujours. » finit-elle par s’écrier, les larmes ayant décidé d’enfin dévaler ses joues.

Elle ne lui laisse pas le temps de répliquer et quitte le petit bar où elle l’a fait venir, ce même bar où ils s’étaient rencontrés quelques années auparavant. La boucle est bouclée. C’est le cœur déchiré qu’elle s’en va, laissant là son passé et leur idylle. Elle eut une légère pensée pour M. et Mme Lahey qui avaient fini par obtenir ce qu’ils voulaient d’elle au final. Sachant qu’il risquait de revenir pour tenter de lui faire changer d’avis, elle avait pris soin de faire ses valises la veille et de dormir dans un hôtel ce soir-là, sans dire où à sa famille.

Aucun des deux ne s’en est jamais remis. Elle, parce qu’elle savait qu’il resterait toujours son premier et seul grand amour, et de toute façon elle ne voulait pas faire subir l’angoisse des missions à quelqu’un. Lui parce qu’il savait qu’elle l’aimait encore, il comprenait pourquoi elle faisait ça, quand bien même il n’était pas d’accord. Et puis… quelques semaines plus tard, il a également appris pour les manœuvres de ses parents qui n’avaient fait qu’aggraver la situation de la jeune femme.

Dès l'arrivée des Wayland à Nashville, Aiden s'est lié d'amitié avec Lukas, étant dans la même fraternité à la fac ils étaient assez souvent fourrés ensemble. Leur amitié n'a jamais flanchée, même quand Aiden et Mercy sont sortis ensemble, ni quand elle l'a quitté. Lukas et Aiden ont toujours gardé le contact, et ce dernier continuait à demander des nouvelles de Mercy.