“ we laughed until we had to cry, we loved until we said goodbye. ”

Te voilà face au miroir, face à ce que tu redoutais le plus. Ton coeur s'emballe une unième fois tandis que tu observes la silhouette masculine s'éloigner. Lui aussi s'en va. Lui aussi te laisse. Tu as peiné pour tenter de le retenir. Mais c'est trop tard. Les larmes roulent sur tes joues. Ton père, ton frère et maintenant lui, ton ami, ton confident. La guerre. Les batailles. L'armée. Souvent tu ne veux plus penser à tout ça, tu veux t'évader, mais tu es prisonnière. Prisonnière d'un père absent, prisonnière d'une mère désespérée, prisonnière d'un frère enchaîné, prisonnière d'un amour à sens unique. Prisonnière de ta propre vie. Toi la petite fleuriste enfermée dans sa petite boutique à accueillir les quelques rares clients avec un sourire faussé. Tu aurais aimé une autre vie, qu'on t'écrive une autre histoire. Tu as la plupart du temps l'impression d'étouffer sous ton propre poids.

Tu viens d'une famille modeste. Un père parti si et là en mission que tu ne voyais que très rarement à la maison. Il n'est pas ton père, il ne l'a jamais vraiment été. Ta mère a du jongler avec les deux petits, toi et ton aîné. Ton frère avait une admiration pour ton père, cette admiration, tu ne l'avais pas. Tu te demandais même comment cela pouvait-être possible cette fascination. Tu t'es toujours tenue à l'écart de ta famille, plongée dans tes études, dans une vie que tu te forçais à rendre palpitante. Et puis ton frère vous a annoncé à toi et ta mère qu'il entrait également dans l'armée. Et tu te retrouvas seule avec ta mère. Elle semblait dépérir de jour en jour. Tu n'arrivais pas à la consoler. Tu la voyais sombrer dans l'alcoolisme, tu la voyais devenir une tout autre femme que celle que tu avais connue jusqu'alors. Elle te rabaissait. Sans arrêt. Tu ne comprenais pas sa douleur ni sa peine disait-elle. Mais toi tu souffrais aussi, souffrait de l'absence de ton frère qui était la seule personne de ta famille que tu chérissais réellement. Et là ce fut le coup de grâce, la rupture. Ton frère, ton frère si brave, si dévoué, si aimant n'était plus qu'un corps pâle sur un lit d'hôpital. Dans le coma. Entre la vie et la mort. Pour toi il était déjà mort. Il était trop tard. Ta mère continuait d'espérer de voir ton père rentrer, de voir ton frère se réveiller mais aucun des deux cas ne se produisit. Et les insultes continuèrent ainsi que ton enfoncement intérieur.

Tu avais réussi un peu à te détacher. Ta passion pour la nature te mena tout droit à ouvrir une petite boutique de fleurs. Les fleurs apaisent la souffrance, elles éliminent petit à petit la douleur et apportent une paix intérieur. Tu te sens un peu plus libre, un peu plus prompt à surmonter tes démons. Tu habites même dans une maison à toi ! Mais ta conscience n'est pas pour autant tranquille car ton coeur attends encore pour quelqu'un d'autre.